Selon des experts économiques, l'investissement, les infrastructures et l'innovation sont essentiels pour améliorer la résilience économique du Canada
Les leaders canadiens doivent accepter les risques et adopter des réformes pour jeter les assises d'une économie plus solide dans le contexte des bouleversements économiques mondiaux et des politiques protectionnistes, ont fait valoir des spécialistes en économie à l'occasion de l'événement « Tableau de bord 2025 de la Coalition pour un avenir meilleur ».
Gauche à droite : Michael Serapio, animateur de PrimeTime Politics sur CPAC, Dawn Desjardins, économiste en chef chez Deloitte Canada; Stephen Tapp, président et économiste en chef au Centre d'étude des niveaux de vie; Alex Ciappara, économiste en chef à l'Association des banquiers canadiens. PHOTO: MELANIE SHIELDS
La tribune était composée de Dawn Desjardins, économiste en chef chez Deloitte Canada ; Stephen Tapp, président et économiste en chef au Centre d'étude des niveaux de vie ; et Alex Ciappara, économiste en chef à l'Association des banquiers canadiens. Au cours d'une discussion animée par Michael Serapio, animateur de PrimeTime Politics sur CPAC, la tribune a abordé des enjeux tels que l'impact des tarifs douaniers et l'érosion du système commercial mondial fondé sur des règles.
Mme Desjardins a ouvert la séance en présentant des perspectives peu réjouissantes, déclarant que la situation tarifaire « a déjà un impact sur notre économie. Elle a un impact sur nos entreprises. » Il a ajouté que lorsqu'on demande aux employeurs s'ils ont l'intention d'investir ou d'embaucher, « ils répondent non pour l'instant, ce qui est une réponse très responsable, je pense, compte tenu de toute cette pression ».
Les données de la Coalition montrent que l'investissement du secteur privé en tant que part du PIB nominal a chuté à ses niveaux les plus bas depuis la Seconde Guerre mondiale. Les investissements canadiens dans les machines, les équipements et la propriété intellectuelle sont inférieurs à ceux de la plupart des pays du G7.
Mme Desjardins a souligné que le Canada devait voir au-delà des turbulences actuelles. « Nous devons renforcer une culture de la prise de risque, une culture de l'intégration d'éléments tels que l'IA dans les processus de l'ensemble des entreprises canadiennes », a-t-elle insisté.
Faisant référence à une enquête récente de Deloitte, Mme Desjardins a déclaré que, bien que le Canada ait été l'un des premiers pays à développer l'intelligence artificielle, seuls 26 % des entreprises canadiennes utilisent actuellement cette technologie. « Nous devons augmenter cette proportion et nous concentrer sur l'accroissement de l'adoption et de la commercialisation », a-t-elle ajouté.
« Nous devons renforcer une culture de la prise de risque, une culture de l'intégration d'éléments tels que l'IA dans les processus de l'ensemble des entreprises canadiennes . »
Dawn Desjardins, économiste en chef, Deloitte Canada
M. Tapp a souligné les changements intervenus dans les relations entre le Canada et les États-Unis sous l'administration du président Donald Trump. Il a noté qu'avec l'érosion du système commercial mondial fondé sur des règles, le Canada doit se concentrer sur les domaines qu'il peut contrôler, tels que le système fiscal et la rationalisation des approbations réglementaires pour les grands projets.
« Nous ne savons pas nécessairement ce que Trump fera lorsqu'il se réveillera avec ce tarif ou quel taux, mais nous contrôlons certaines choses en interne, comme notre système fiscal », a-t-il déclaré. « Il faut le revoir et réfléchir à la manière dont nous pouvons taxer efficacement les investissements, les entreprises et les personnes qui touchent des revenus. »
M. Tapp a également déclaré que, pour contrer les chocs commerciaux extérieurs, nous « devons diversifier nos échanges et travailler avec des pays partageant les mêmes idées, comme l'Union européenne et la région Asie-Pacifique ».
M. Ciappara a ajouté que le renouveau économique devait passer par des investissements audacieux dans les infrastructures. « Cela signifie qu'il faut construire de grandes infrastructures, des projets favorisant le commerce pour acheminer nos biens, nos services et nos personnes vers les marchés », a-t-il déclaré. « Il faut donc davantage de ports, de chemins de fer, d'aéroports, d'autoroutes et d'infrastructures numériques pour soutenir l'intelligence artificielle et les centres de données. »
Il a également fait valoir la résilience énergétique et l'importance de l'accès aux minéraux essentiels dans le Nord. « Cela signifie qu'il faut construire un réseau électrique est-ouest et un réseau à large bande fiable pour les habitants des zones rurales. »
M. Ciappara a indiqué que les maisons modulaires et préfabriquées étaient des solutions pour améliorer la productivité du secteur de la construction résidentielle au Canada, qui est à la traîne. Il a également souligné l'importance du développement de l'Arctique, faisant valoir que de tels projets servent « les objectifs multiples du développement de notre économie nordique, de la protection de notre souveraineté et de l'implication des peuples autochtones ».
Interrogé sur le juste équilibre entre les investissements publics et privés pour mener à bien les projets, M. Ciappara a plaidé en faveur des partenariats public-privé, tout en soulignant que les régulateurs et les décideurs politiques devaient « se concentrer sur l'objectif final » et évaluer la manière dont un projet ou une politique améliore notre compétitivité ou notre productivité.
Mme Desjardins a abondé dans ce sens, en soulignant que les dépenses publiques ne devaient pas laisser pour contre les investissements privés. « Nous voulons utiliser l'investissement public pour faciliter la construction des infrastructures que les entreprises privées peuvent utiliser pour étendre leur champ d'action, qu'il s'agisse d'accéder à de nouveaux marchés d'exportation ou simplement à des clients situés à l'autre bout du pays », a-t-elle affirmé.
« Cela signifie qu'il faut construire de grandes infrastructures, des projets favorisant le commerce pour acheminer nos biens, nos services et nos personnes vers les marchés . »
Alex Ciappara, économiste en chef, l'Association des banquiers canadiens
Photo: Melanie Shields
La tribune a également fait valoir que l'amélioration du commerce intérieur était un facteur crucial de la croissance économique.
Mme Desjardins et M. Tapp ont insisté sur l'importance de supprimer les barrières commerciales interprovinciales et d'améliorer la mobilité de la main-d'œuvre. « C'est en quelque sorte un fruit à portée de main... C'est quelque chose que nous pouvons contrôler », a déclaré Mme Desjardins. « La croissance du PIB s'en trouvera renforcée. Je pense donc que c'est un impératif à court terme ».
M. Tapp a fait remarquer que la suppression des barrières commerciales intérieures permettra à notre marché intérieur de fonctionner plus efficacement et de garantir que « nous pouvons nous développer et croître à l'intérieur du marché canadien, au lieu d'avoir des marchés segmentés ».
M. Ciappara a proposé le secteur bancaire comme modèle pour la suppression des barrières commerciales internes. Le secteur bancaire canadien étant réglementé au niveau fédéral, il « permet aux banques d'opérer dans tout le pays sans tenir compte des frontières provinciales », a-t-il précisé.
La tribune a conclu que le moment était venu d'entreprendre des réformes. Les décideurs et les chefs d'entreprise doivent agir rapidement pour exploiter les atouts nationaux et saisir les nouvelles occasions afin de bâtir une économie capable de résister aux chocs extérieurs.