La division des électeurs et les incertitudes politiques pourraient freiner les ambitions de M. Carney, selon les panélistes
Theo Argitis, rédacteur en chef de The Hub Canada et Nik Nanos, scientifique en chef des données et fondateur de Nanos Research Group of Companies avec Michael Serapio, animateur de PrimeTime Politics sur CPAC . PHOTO: MELANIE SHIELDS
Le gouvernement minoritaire du premier ministre Mark Carney sera confronté à des enjeux importants dans la poursuite de ses programmes politiques ambitieux, ont déclaré des experts lors d'une discussion sur le contexte politique postélectoral à l'occasion de l'Événement du Rapport sur le Tableau de bord 2025 de la Coalition pour un avenir meilleur.
Le Tableau de bord permet de suivre les progrès réalisés par le Canada par rapport aux grands indicateurs économiques, sociaux et environnementaux au cours de la prochaine décennie. L'événement du 22 mai a rassemblé des personnalités de premier plan l'ensemble des secteurs économiques et politiques du Canada.
Nik Nanos, scientifique en chef des données et fondateur de Nanos Research Group of Companies, et Theo Argitis, rédacteur en chef de The Hub Canada, se sont penchés sur l'humeur des électeurs après les élections et sur l'impact de la situation minoritaire sur la capacité du gouvernement à poursuivre son ambitieux programme politique.
M. Nanos a fait valoir que les Canadiens restaient divisés à la suite des élections, les niveaux de soutien demeurant stables pour les deux grands partis. Selon lui, la victoire des libéraux s'explique par l'intérêt porté à M. Carney, et non par l'adhésion des électeurs au gouvernement libéral de ces dix dernières années.
« Il s'agissait de Mark Carney en tant que personne, en tant que nouveau leader des libéraux, et les gens voulaient lui donner une chance », a-t-il déclaré.
M. Nanos a fait valoir que les partisans non libéraux sont fermement déterminés à vouloir que le Canada change de cap en chassant les libéraux du pouvoir. Il a ajouté que les jeunes vivent une intensification du sentiment d'anxiété et du pessimisme, le président des États-Unis Donald Trump ayant un effet accélérateur à cet égard.
« La grande question est de savoir quand quelque chose va se passer. Je pense que c'est ce que les jeunes veulent savoir », a déclaré Mme Nanos.
M. Argitis a fait valoir que l'élan de soutien pour M. Carney pourrait ralentir à mesure que les tensions avec les États-Unis semblent s'apaiser, étant donné que M. Trump semble être en mode « accord » en ce qui concerne le commerce. Il a ajouté qu'en l'absence de crise, le changement transformateur pourrait ne pas avancer, malgré les promesses de campagne de M. Carney.
« Le contexte propice permettant à Mark Carney de procéder à un changement transformateur, ou d'utiliser une crise pour procéder à un changement transformateur, pourrait être beaucoup plus éphémère qu'il ne le pense », a déclaré M. Argitis. « Ce sera très difficile. »
M. Argitis a déclaré que les incohérences de la campagne de M. Carney, telles que sa promotion du secteur pétrolier et gazier et du programme de transition climatique, obligeront le premier ministre à faire des compromis. Il a ajouté que le soutien croissant au séparatisme en Alberta compliquera encore ces tensions, surtout si on tient compte de l'importance du caucus libéral québécois.
« Il doit afficher des progrès en matière de transition climatique pour satisfaire, par exemple, son caucus québécois », a-t-il indiqué. « Une grave désaffection de l'Ouest ou un mouvement séparatiste en provenance de l'Alberta compromettrait sa capacité d'y parvenir. »
M. Nanos a fait valoir que tous les premiers ministres devaient faire face à des situations imprévues. Pour M. Carney, il pense qu'il s'agira de Trump et du séparatisme occidental, qui pourraient « facilement faire dérailler ses efforts pour faire avancer son grand programme ».
Selon M. Nanos, le Nanos Research Group, qui a interrogé 1 000 Albertains pour le Globe and Mail, a constaté que seulement six personnes sur dix pensaient que la meilleure voie à suivre pour la province sur le plan économique était celle de la collaboration avec le Canada.
« Nous devons prendre cela au sérieux. C'est en fait d'une importance capitale », a déclaré M. Nanos.
Selon M. Argitis, l'Alberta se sert du séparatisme comme d'un levier dans le contexte politique unique qui prévaut actuellement.
« Tout le monde garde en quelque sorte ses cartes bien en main », a-t-il conclu. « Nous verrons bien comment M. Carney s'en sortira. »